Associé ! Ce mot, qui résonne comme la promesse d’un avenir meilleur, est l’objectif que la plupart des collaborateurs libéraux ont à l’esprit, à plus ou moins court terme. Il est rare en effet qu’un libéral s’inscrive, dans la durée, dans une « carrière » qu’il gérerait de recrutement en recrutement, comme le fait l’immense majorité des diplômés dans l’industrie ou le commerce.
C’est la logique, bien sûr d’une profession libérale, que beaucoup embrassent pour l’amour de l’indépendance : « Même si elle exige parfois la rançon élevée d’une angoisse quotidienne, cette solitude n’en reste pas moins, aux yeux de certains, la forme la plus pure de leur activité[[1]]. »
C’est aussi la conséquence de notre histoire, le statut individuel ayant été le seul statut légal, pour un avocat, en France, jusqu’en 1954, année de la création de l’association d’avocats[[2]] [[3]]. Une évolution tardive, comparée à celle des avocats anglo-saxons, qui a forgé une véritable culture de l’exercice individuel[[4]].
L’objectif de l’association fait partie de l’essence même du contrat de collaboration libérale. Certaines professions l’érigent en principe. Ainsi, le contrat type de l’Ordre des masseurs kinésithérapeutes prévoit que « Le titulaire désirant s’associer s’engage à proposer prioritairement cette association au collaborateur. »[[5]] Pour l’ordre des médecins[[6]] , la collaboration « n’est pas une fin en soi, elle doit conduire à l’association, à la reprise ou à la création d’un cabinet… ». Selon l’UNAPL[[7]] , « le contrat de collaboration libérale leur permet d’acquérir une expérience auprès d’un professionnel plus aguerri. Il est le prélude à une association avec ce dernier ou à une reprise de son cabinet ».
Notre Règlement Intérieur National (RIN) ne prévoit aucune disposition similaire, ce qui est sans aucun doute une lacune. Depuis 2012, toutefois, le barreau de Paris a adopté une charte de la collaboration qui prévoit que « : Le collaborateur/la collaboratrice a vocation notamment à s’installer ou à être associé(e[[8]] ) », ou encore que « Le collaborateur /la collaboratrice doit être en mesure, s’il/elle le souhaite, d’anticiper son évolution possible au sein du cabinet[[9]] ». Enfin l’article 5.1 de la Charte prévoit clairement que lors de l’entretien annuel, « …le cabinet s’efforce à cet égard de donner au collaborateur/à la collaboratrice une vision claire de l’appréciation du cabinet quant à sa capacité à évoluer au sein de celui-ci…. En présence de collaborateurs/collaboratrices expérimenté(e)s et en fonction de la structure du cabinet, la question de son éventuelle association devra être abordée ».
Avec environ 12.000 collaborateurs rien qu’au barreau de Paris, il est clair que le sujet est stratégique et l’observateur attentif verra poindre, dans ces différents textes, au profit du collaborateur libéral, non pas un droit à l’association, mais un « droit à l’évolution » dans la structure, ce qui constitue un net progrès au regard de la pratique encore fort répandue, consistant à faire de l’association une sorte de processus secret et mystérieux, auquel on initiera peu à peu les éléments méritants.
Il s’agit après tout d’un sujet naturel, entre libéraux, qu’il faudrait être capable d’aborder sans tabous, mais aussi sans angélisme, car l’aventure est complexe.
Voilà pour le « pourquoi ». Reste le « comment », ce qui n’est pas le plus simple, tant les modalités sont nombreuses. On ne s’en plaindra pas ; certains ont parfois critiqué le trop grand choix de structures juridiques existantes pour les avocats, mais il faut plutôt se féliciter qu’il soit possible de choisir et combiner, en fonction des besoins de chaque espèce, les solutions offertes par le droit positif.
C’est donc logiquement qu’on abordera successivement la question centrale de la patrimonialité qui induit un conflit d’intérêts, entre le patron-cédant, et le collaborateur-acquéreur (1), les opérations de transmission que j’intitule « classiques » au sens où elles ne règlent pas le conflit d’intérêts (2), puis les montages plus novateurs : les opérations temporaires ou de test de l’association (3), les opportunités offertes par la « dépatrimonialisation » (4), et enfin les opérations avec optimisation patrimoniale ou comment recevoir le prix sans que le collaborateur ne le paye (5).[[10]]
C’est la logique, bien sûr d’une profession libérale, que beaucoup embrassent pour l’amour de l’indépendance : « Même si elle exige parfois la rançon élevée d’une angoisse quotidienne, cette solitude n’en reste pas moins, aux yeux de certains, la forme la plus pure de leur activité[[1]]. »
C’est aussi la conséquence de notre histoire, le statut individuel ayant été le seul statut légal, pour un avocat, en France, jusqu’en 1954, année de la création de l’association d’avocats[[2]] [[3]]. Une évolution tardive, comparée à celle des avocats anglo-saxons, qui a forgé une véritable culture de l’exercice individuel[[4]].
L’objectif de l’association fait partie de l’essence même du contrat de collaboration libérale. Certaines professions l’érigent en principe. Ainsi, le contrat type de l’Ordre des masseurs kinésithérapeutes prévoit que « Le titulaire désirant s’associer s’engage à proposer prioritairement cette association au collaborateur. »[[5]] Pour l’ordre des médecins[[6]] , la collaboration « n’est pas une fin en soi, elle doit conduire à l’association, à la reprise ou à la création d’un cabinet… ». Selon l’UNAPL[[7]] , « le contrat de collaboration libérale leur permet d’acquérir une expérience auprès d’un professionnel plus aguerri. Il est le prélude à une association avec ce dernier ou à une reprise de son cabinet ».
Notre Règlement Intérieur National (RIN) ne prévoit aucune disposition similaire, ce qui est sans aucun doute une lacune. Depuis 2012, toutefois, le barreau de Paris a adopté une charte de la collaboration qui prévoit que « : Le collaborateur/la collaboratrice a vocation notamment à s’installer ou à être associé(e[[8]] ) », ou encore que « Le collaborateur /la collaboratrice doit être en mesure, s’il/elle le souhaite, d’anticiper son évolution possible au sein du cabinet[[9]] ». Enfin l’article 5.1 de la Charte prévoit clairement que lors de l’entretien annuel, « …le cabinet s’efforce à cet égard de donner au collaborateur/à la collaboratrice une vision claire de l’appréciation du cabinet quant à sa capacité à évoluer au sein de celui-ci…. En présence de collaborateurs/collaboratrices expérimenté(e)s et en fonction de la structure du cabinet, la question de son éventuelle association devra être abordée ».
Avec environ 12.000 collaborateurs rien qu’au barreau de Paris, il est clair que le sujet est stratégique et l’observateur attentif verra poindre, dans ces différents textes, au profit du collaborateur libéral, non pas un droit à l’association, mais un « droit à l’évolution » dans la structure, ce qui constitue un net progrès au regard de la pratique encore fort répandue, consistant à faire de l’association une sorte de processus secret et mystérieux, auquel on initiera peu à peu les éléments méritants.
Il s’agit après tout d’un sujet naturel, entre libéraux, qu’il faudrait être capable d’aborder sans tabous, mais aussi sans angélisme, car l’aventure est complexe.
Voilà pour le « pourquoi ». Reste le « comment », ce qui n’est pas le plus simple, tant les modalités sont nombreuses. On ne s’en plaindra pas ; certains ont parfois critiqué le trop grand choix de structures juridiques existantes pour les avocats, mais il faut plutôt se féliciter qu’il soit possible de choisir et combiner, en fonction des besoins de chaque espèce, les solutions offertes par le droit positif.
C’est donc logiquement qu’on abordera successivement la question centrale de la patrimonialité qui induit un conflit d’intérêts, entre le patron-cédant, et le collaborateur-acquéreur (1), les opérations de transmission que j’intitule « classiques » au sens où elles ne règlent pas le conflit d’intérêts (2), puis les montages plus novateurs : les opérations temporaires ou de test de l’association (3), les opportunités offertes par la « dépatrimonialisation » (4), et enfin les opérations avec optimisation patrimoniale ou comment recevoir le prix sans que le collaborateur ne le paye (5).[[10]]
[[1]] Jean-Claude Woog, Pratique professionnelle de l’avocat, Litec, § 1.3.2 p.102
[[2]] Décret nº 54-406 du 10 avril 1954
[[3]] initialement limitée à 3 associés, puis ensuite libéralisée
[[4]] À tel point que l’Ordre de Paris, dans le règlement des litiges, promeut encore l’idée d’un avocat au statut spécifique supérieur, qui lui rendrait inopposables certaines dispositions du code des sociétés, sacrifiées notamment sur l’autel de l’indépendance et de la liberté d’exercice
[[5]] Contrat type de l’Ordre des masseurs kinésithérapeutes, Article 19 « Association du titulaire »
[[6]] Dr Gérard Zeiger, vice-président du Conseil national de l’Ordre des médecins « TOUT PRÉVOIR » n°366 • novembre 2005
[[7]] Guide pratique UNAPL 2011 « s’installer en profession libérale »
[[8]] Charte de la collaboration du Barreau de Paris - préambule
[[9]] Idem
[[10]] Bien que le titre d’associé soit de plus en plus décorrélé de sa signification capitalistique et tend à définir un statut d’autonomie dans la relation avec le client, on ne parlera pas non plus des statuts alternatifs (tel que Of counsel), mais exclusivement ici d’association au sens propre, c’est-à-dire en capital