Afin de rendre la protection efficace, le prix de cession est toujours séquestré, le séquestre ne s’en dessaisissant qu’après avoir vérifié que les inscriptions (usuellement privilège du vendeur et nantissement) ont bien été radiées et les oppositions levées.
L’article L.141-17 du Code de commerce précise que l’acquéreur qui paie son vendeur sans avoir fait les publications dans les formes prescrites, ou avant l’expiration du délai de dix jours, n’est pas libéré à l’égard des tiers.
Il encourt le risque de payer deux fois, une fois le vendeur et une fois les créanciers.
Evidemment, si la mutation du fonds est occulte, ce mécanisme de protection ne peut jouer.
Il en va de même si la cession du fonds est effectuée au bénéfice d’un tiers complice, à vil prix.
Dans ces deux cas, le « cédant » organise son insolvabilité en quelque sorte. Seule une action paulienne, fondée sur l’article 1341-2 du Code civil (anciennement article 1167) sera alors envisageable.
Cette action permet au créancier d’agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d'établir, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.
Autrement dit, le créancier pourra saisir le fonds de commerce de son débiteur, après la cession, entre les mains du tiers acquéreur. Pour lui, la cession n’existe pas.
Cass 1ère civile 30 mai 2006 n°02-13.495 : « l'inopposabilité paulienne autorise le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d'une aliénation opérée en fraude de ses droits afin d'en faire éventuellement saisir l'objet entre les mains du tiers. En ordonnant le retour des sommes données dans le patrimoine du débiteur, la cour d'appel a violé l'article 1167 du Code civil»
In concreto, il s’agira de saisir non pas le fonds lui-même, qui est une abstraction, mais les créances ou les disponibilités issues de l’exploitation du fonds par le tiers complice.
Cette protection est forte, mais elle implique que l’acquéreur apporte la preuve de la fraude.
L’absence de contrepartie sérieuse constitue un élément permettant de rendre inopposable une cession et de considérer que l’acte est manifestement frauduleux (Cass 1ère civile 28 janvier 1992 n°90-95.641).
Cette solution est-elle transposable en matière de cession de fonds libéral ?
On sait que les cessions de fonds d’exercice libéral, rendues juridiquement valides par un arrêt de la cour de cassation du 7 novembre 2000 (Cass civ n° 98-17.731), ne sont assujetties à aucune mesure de publicité.
Seules les formalités auprès des ordres professionnels ainsi que l’enregistrement de l’acte de cession sont obligatoires.
Les créanciers n’ont donc pas de possibilité de faire opposition à une telle cession, qui n’est pas publique.
La nature particulière de l’activité libérale, reposant quasi exclusivement sur la personne du professionnel exerçant et n’impliquant que peu de moyens matériels, hormis pour les professions de santé, rend quelque peu artificielle tout hypothèse de mise en œuvre d’une sûreté portant sur le fonds.
Dans ces conditions, l’action paulienne serait en théorie ouverte au créancier d’un professionnel ayant procédé à la cession de son fonds libéral, puisque la notion de fonds libéral est désormais entrée dans le droit positif.
Les hypothèses de mutation occulte d’un tel fonds semblent cependant assez théoriques, tant le fonds est attaché à la personne du professionnel lui-même.
Il arrive que la mutation occulte du fonds de commerce ait pour objectif, non pas d’organiser l’insolvabilité du débiteur, mais d’échapper aux conséquences fiscales d’une cession : paiement des plus-values et droits d’enregistrement.
Cette hypothèse peut se rencontrer en présence d’un groupe d’entreprises sous contrôle commun, qui souhaite procéder à des transferts d’activité d’une structure à une autre.
L’administration fiscale est alors en droit de procéder à un redressement des résultats de l’entreprise bénéficiaire du transfert, taxable au taux de 33,33 %, sur le fondement d’un accroissement de son actif net.
Citons par exemple une décision de la Cour administrative d’appel de Paris du 10 décembre 2015 ayant retenu une cession occulte :
«dans le cas où un fonds de commerce a été transmis sans contrepartie de manière occulte pour dissimuler une libéralité faite par une entreprise à une autre, l’administration est fondée à augmenter l’actif net de la société récipiendaire dudit fonds à proportion de la valeur vénale de ce dernier, laquelle, au demeurant, correspond, si l’entreprise cédante est passible de l’impôt sur les sociétés, à un avantage occulte imposable entre les mains de l’entreprise cessionnaire en vertu des dispositions du c de l’article 111 du même code».
Il est nécessaire qu’une communauté d’intérêts entre le cédant et le cessionnaire soit démontrée.
Dans la plupart des cas, celle-ci résultera d’une identité de dirigeants et/ou d’actionnaire majoritaire (Cf. sur ce dernier point notre brève du 18 octobre 2016 : « transfert d’une clientèle ou d’un fonds libéral à une société : conséquences en l’absence de formalités »).[[1]]
Ici également, une application de ces principes aux activités libérales ne semble pas évidente du fait de l’intuitu personnae qui caractérise les activités intellectuelles.
Il est toutefois probable qu’avec l’évolution des modes d’exercice des professionnels libéraux, qui s’est accélérée avec l’adoption de la loi « Macron » du 6 août 2015, on assiste à l’émergence de groupes sous le contrôle unique de professionnels.
Dans cette hypothèse, sur le principe, des mutations occultes pourraient être mises en œuvre
L’article L.141-17 du Code de commerce précise que l’acquéreur qui paie son vendeur sans avoir fait les publications dans les formes prescrites, ou avant l’expiration du délai de dix jours, n’est pas libéré à l’égard des tiers.
Il encourt le risque de payer deux fois, une fois le vendeur et une fois les créanciers.
Evidemment, si la mutation du fonds est occulte, ce mécanisme de protection ne peut jouer.
Il en va de même si la cession du fonds est effectuée au bénéfice d’un tiers complice, à vil prix.
Dans ces deux cas, le « cédant » organise son insolvabilité en quelque sorte. Seule une action paulienne, fondée sur l’article 1341-2 du Code civil (anciennement article 1167) sera alors envisageable.
Cette action permet au créancier d’agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d'établir, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.
Autrement dit, le créancier pourra saisir le fonds de commerce de son débiteur, après la cession, entre les mains du tiers acquéreur. Pour lui, la cession n’existe pas.
Cass 1ère civile 30 mai 2006 n°02-13.495 : « l'inopposabilité paulienne autorise le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d'une aliénation opérée en fraude de ses droits afin d'en faire éventuellement saisir l'objet entre les mains du tiers. En ordonnant le retour des sommes données dans le patrimoine du débiteur, la cour d'appel a violé l'article 1167 du Code civil»
In concreto, il s’agira de saisir non pas le fonds lui-même, qui est une abstraction, mais les créances ou les disponibilités issues de l’exploitation du fonds par le tiers complice.
Cette protection est forte, mais elle implique que l’acquéreur apporte la preuve de la fraude.
L’absence de contrepartie sérieuse constitue un élément permettant de rendre inopposable une cession et de considérer que l’acte est manifestement frauduleux (Cass 1ère civile 28 janvier 1992 n°90-95.641).
Cette solution est-elle transposable en matière de cession de fonds libéral ?
On sait que les cessions de fonds d’exercice libéral, rendues juridiquement valides par un arrêt de la cour de cassation du 7 novembre 2000 (Cass civ n° 98-17.731), ne sont assujetties à aucune mesure de publicité.
Seules les formalités auprès des ordres professionnels ainsi que l’enregistrement de l’acte de cession sont obligatoires.
Les créanciers n’ont donc pas de possibilité de faire opposition à une telle cession, qui n’est pas publique.
La nature particulière de l’activité libérale, reposant quasi exclusivement sur la personne du professionnel exerçant et n’impliquant que peu de moyens matériels, hormis pour les professions de santé, rend quelque peu artificielle tout hypothèse de mise en œuvre d’une sûreté portant sur le fonds.
Dans ces conditions, l’action paulienne serait en théorie ouverte au créancier d’un professionnel ayant procédé à la cession de son fonds libéral, puisque la notion de fonds libéral est désormais entrée dans le droit positif.
Les hypothèses de mutation occulte d’un tel fonds semblent cependant assez théoriques, tant le fonds est attaché à la personne du professionnel lui-même.
Il arrive que la mutation occulte du fonds de commerce ait pour objectif, non pas d’organiser l’insolvabilité du débiteur, mais d’échapper aux conséquences fiscales d’une cession : paiement des plus-values et droits d’enregistrement.
Cette hypothèse peut se rencontrer en présence d’un groupe d’entreprises sous contrôle commun, qui souhaite procéder à des transferts d’activité d’une structure à une autre.
L’administration fiscale est alors en droit de procéder à un redressement des résultats de l’entreprise bénéficiaire du transfert, taxable au taux de 33,33 %, sur le fondement d’un accroissement de son actif net.
Citons par exemple une décision de la Cour administrative d’appel de Paris du 10 décembre 2015 ayant retenu une cession occulte :
«dans le cas où un fonds de commerce a été transmis sans contrepartie de manière occulte pour dissimuler une libéralité faite par une entreprise à une autre, l’administration est fondée à augmenter l’actif net de la société récipiendaire dudit fonds à proportion de la valeur vénale de ce dernier, laquelle, au demeurant, correspond, si l’entreprise cédante est passible de l’impôt sur les sociétés, à un avantage occulte imposable entre les mains de l’entreprise cessionnaire en vertu des dispositions du c de l’article 111 du même code».
Il est nécessaire qu’une communauté d’intérêts entre le cédant et le cessionnaire soit démontrée.
Dans la plupart des cas, celle-ci résultera d’une identité de dirigeants et/ou d’actionnaire majoritaire (Cf. sur ce dernier point notre brève du 18 octobre 2016 : « transfert d’une clientèle ou d’un fonds libéral à une société : conséquences en l’absence de formalités »).[[1]]
Ici également, une application de ces principes aux activités libérales ne semble pas évidente du fait de l’intuitu personnae qui caractérise les activités intellectuelles.
Il est toutefois probable qu’avec l’évolution des modes d’exercice des professionnels libéraux, qui s’est accélérée avec l’adoption de la loi « Macron » du 6 août 2015, on assiste à l’émergence de groupes sous le contrôle unique de professionnels.
Dans cette hypothèse, sur le principe, des mutations occultes pourraient être mises en œuvre