L'erreur est une cause de nullité du contrat de cession lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant. (article 1132 du code civil)
Dans l’espèce soumise à la Cour de cassation, une société (cédante) s’était engagée, sous certaines conditions, à céder à une autre société (cessionnaire), la totalité des actions qu’elle détenait dans la société T. moyennant le prix provisoire de un euro sur la base d’un besoin en fonds de roulement.
Reprochant à la cédante de lui avoir dissimulé une pratique généralisée, au sein de la société T., de faux certificats de conformité à destination de sa clientèle, la cessionnaire l’assigna en annulation de la cession pour dol.
Aux termes de son pourvoi, la demanderesse soutient que les irrégularités comptables découvertes post-cession affectent les chiffres et données qui lui avaient été présentés, notamment quant au besoin en fond de roulement et à la trésorerie. Elle invoque l’erreur sur les qualités substantielles des titres cédés.
Cet argument n’a pas emporté la conviction des juges du fonds qui observent que : « les [irrégularités comptables] n'empêchaient pas la réalisation de l'objet social de la société T. et qu'ils n'obéraient pas non plus la capacité de cette société à poursuivre son activité ».
La Cour de cassation approuve ainsi la cour d’appel pour avoir jugé que « les inexactitudes comptables alléguées n'étaient pas constitutives d'une erreur affectant les qualités substantielles des actions acquises par la cessionnaire »
Cette décision s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation. En effet, la Haute juridiction avait déjà jugé, par le passé, qu’une cession ne peut être annulée lorsque l'erreur alléguée n'affectait que la valeur des actions cédées et n'avait pas empêché la société de poursuivre l'activité économique constituant son objet social. (Cass. com., 18 février 1997, 95-12.617)
Par ailleurs, une lecture a contrario de cet attendu laisse entendre que si ces irrégularités avaient empêché la réalisation de l'objet social de la société et avaient obéré sa capacité à poursuivre son activité, la cession aurait sans doute été annulée.
Une telle solution mérite d’être saluée. La Cour de cassation prend ici le soin de concilier l’impératif de protection du consentement des parties au contrat avec la nécessité d’assurer la sécurité de la transaction.
On notera au surplus que cette solution est conforme à la volonté du législateur qui, tant en 1804 qu’à l’occasion de la réforme du droit des obligations, s’efforce de limiter les causes de nullité pour erreur.
La cession litigieuse ayant été conclue avant le 1er octobre 2016, il semble pertinent de s’interroger sur l’impact de la réforme du droit des contrats sur la portée d’une telle solution. (cass. com., 1 octobre 1991, 89-13.967)
Pour mémoire, avant la réforme, le code civil prévoyait que l’erreur n’était une cause de nullité de la vente que si elle portait sur les « qualités substantielles » des actions acquises (article 1110 ancien du code civil). Maintes fois il a été jugé que ces qualités substantielles étaient celles à défaut desquelles la poursuite de l’activité sociale était impossible.
Dans un souci de clarification, les rédacteurs de l’ordonnance ont simplement substitué la formule de « qualités essentielles » à celle de « qualités substantielles ». Il nous semble que ce changement de terminologie n’affectera en rien le sens donné à cette solution.
Cass. com., 21 Octobre 2020 – n° 17-31.663
Dans l’espèce soumise à la Cour de cassation, une société (cédante) s’était engagée, sous certaines conditions, à céder à une autre société (cessionnaire), la totalité des actions qu’elle détenait dans la société T. moyennant le prix provisoire de un euro sur la base d’un besoin en fonds de roulement.
Reprochant à la cédante de lui avoir dissimulé une pratique généralisée, au sein de la société T., de faux certificats de conformité à destination de sa clientèle, la cessionnaire l’assigna en annulation de la cession pour dol.
Aux termes de son pourvoi, la demanderesse soutient que les irrégularités comptables découvertes post-cession affectent les chiffres et données qui lui avaient été présentés, notamment quant au besoin en fond de roulement et à la trésorerie. Elle invoque l’erreur sur les qualités substantielles des titres cédés.
Cet argument n’a pas emporté la conviction des juges du fonds qui observent que : « les [irrégularités comptables] n'empêchaient pas la réalisation de l'objet social de la société T. et qu'ils n'obéraient pas non plus la capacité de cette société à poursuivre son activité ».
La Cour de cassation approuve ainsi la cour d’appel pour avoir jugé que « les inexactitudes comptables alléguées n'étaient pas constitutives d'une erreur affectant les qualités substantielles des actions acquises par la cessionnaire »
Cette décision s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation. En effet, la Haute juridiction avait déjà jugé, par le passé, qu’une cession ne peut être annulée lorsque l'erreur alléguée n'affectait que la valeur des actions cédées et n'avait pas empêché la société de poursuivre l'activité économique constituant son objet social. (Cass. com., 18 février 1997, 95-12.617)
Par ailleurs, une lecture a contrario de cet attendu laisse entendre que si ces irrégularités avaient empêché la réalisation de l'objet social de la société et avaient obéré sa capacité à poursuivre son activité, la cession aurait sans doute été annulée.
Une telle solution mérite d’être saluée. La Cour de cassation prend ici le soin de concilier l’impératif de protection du consentement des parties au contrat avec la nécessité d’assurer la sécurité de la transaction.
On notera au surplus que cette solution est conforme à la volonté du législateur qui, tant en 1804 qu’à l’occasion de la réforme du droit des obligations, s’efforce de limiter les causes de nullité pour erreur.
La cession litigieuse ayant été conclue avant le 1er octobre 2016, il semble pertinent de s’interroger sur l’impact de la réforme du droit des contrats sur la portée d’une telle solution. (cass. com., 1 octobre 1991, 89-13.967)
Pour mémoire, avant la réforme, le code civil prévoyait que l’erreur n’était une cause de nullité de la vente que si elle portait sur les « qualités substantielles » des actions acquises (article 1110 ancien du code civil). Maintes fois il a été jugé que ces qualités substantielles étaient celles à défaut desquelles la poursuite de l’activité sociale était impossible.
Dans un souci de clarification, les rédacteurs de l’ordonnance ont simplement substitué la formule de « qualités essentielles » à celle de « qualités substantielles ». Il nous semble que ce changement de terminologie n’affectera en rien le sens donné à cette solution.
Cass. com., 21 Octobre 2020 – n° 17-31.663